Mètis avec Pierre Creton

Durée : 32 mn
Support mini DV (couleur)
Réalisation : Vincent Barré. Assistance à la photographie et montage Pierre Creton
Textes d'Empédocle: de la Nature (La Pleiade).
Avec : Lucie Chaumont, Antoine Tarot, Richard Deacon, Pierre-Alexandre Rémy.
et la voix de Françoise Lebrun.
Lieux de tournage : Selinonte, Sicile, Les Cinq Rois, Gâtinais, L'abbaye du Thoronet, Var
Année : 2007 Mètis, avec l'assistance de Pierre Creton

texte de Jean-Pierre Rehm

C’est bien connu, filmer un artiste au travail n’est pas tâche aisée. L’académisme de la pose risque de le disputer à l’illusoire de ce qui serait ainsi prouvé. C’est sans doute pourquoi Vincent Barré, complice par ailleurs à plusieurs occasions de Pierre Creton, a choisi de prendre lui-même les rênes de l’opération. Et de laisser place aussi aux échanges avec un autre sculpteur de renom, Richard Deacon. L’atelier se présente donc comme le lieu du dessin, de la fabrique de la sculpture, de la conversation, mais aussi comme le cadre imparti à la caméra. Mais c’est sans doute elle aussi, la caméra, qui commande de quitter le seul atelier où les feux d’une voiture nous aura d’abord conduit, pour s’ouvrir au chantier archaïque de la fonderie, à ses ténèbres zébrées d’incandescence. Et puis, ouverture encore, dans un mouvement à rebours, l’image filmée remonte aux sources de ses formes sculptées. Preuves par l’image de la filiation, défilent les paysages et les rites de la Méditerranée : architecture cistercienne en Provence, sites antiques grecs, processions de la semaine sainte en Sicile. Lente remontée d’une réminiscence qui s’accompagne de textes pour lui fondateurs, Original version et Bataille, lus par Françoise Lebrun. Et voilà que ce qui devait s’éclairer se confond, que ce qui devait guider s’éparpille. Au lieu d’informer, la forme se déforme. Ce n’est pas hasard que le nom du Stalker, inventé par Tarkovski pour le plaisir de brouiller les pistes, puisse servir ici au final d’enseigne.

It is well-known fact that filming an artist at work is no easy task. The academic nature of the pose risks to put it in conflict with the illusion of that which would thus be proven. It is undoubtedly why Vincent Barré, who has otherwise collaborated on several occasions with Pierre Creton, has chosen to take the reins of the operation in hand himself. And to also give space to an exchange with another well-known sculptor, Richard Deacon. The studio is thus presented as a place for drawing, sculpting and conversation, but also as the frame granted to the camera. But it is also undoubtedly the camera itself that decides to leave the only studio where the lights of a car first drove us, to open up to the archaic workplace of the foundry and its shadow-striped incandescence. And then, opening again, in a backward movement, the film image returns to the source of his sculpted forms. Images prove the relationship as Mediterranean landscapes and rituals are paraded that include Cistercian architecture in Provence, Ancient Greek sites and Holy Week processions in Sicily. The slow resurfacing of a reminiscence that accompanies texts by Empedocles and Bataille that he considers to be fundamental, read by Françoise Lebrun. And so it is that what should be illuminated is confused while that which should guide us scatters. Instead of informing, the form becomes de-formed. It is no accident that the name of Stalker, invented by Tarkovski for the pleasure of clouding the issue, may serve here finally as a sign.