L’origine est proche, présentée à la galerie Bernard Jordan, est la suite parisienne de l’exposition du Musée des Beaux-Arts et d’Archéologie de Besançon où l’œuvre de Vincent Barré dialogue avec les riches collections de l’institution, entre pièces archéologiques et peintures flamandes. Si Barré est un contemporain, c’est en ce sens qu’il explore l’histoire de l’art en tissant la sienne propre avec les formes du passé pour en créer de nouvelles et révéler leur dimension sacrée. L’origine est proche, toute proche, comme un fleuve que l’on remonte, un fil que l’on déroule au labyrinthe où se composent et se recomposent à l’infini les fragments d’un corps dispersé entre histoires et civilisations. La formule choisie par Vincent Barré, empruntée à Jean-Christophe Bailly suggère un cycle où l’archaïsme peut s’entendre au futur, comme un horizon où se réconcilient les apparences contraires. Rien n’est ici binaire ou dualiste, puisque tout dans l’œuvre de Vincent Barré reste en tension pour engendrer une présence. L’exposition confronte dessins et sculptures, des dessins de sculptures, autant de tracés qui servent à penser la forme à venir, étape nécessaire au processus de création. La couronne, élément récurrent de l’œuvre de Vincent Barré, est ici plus dionysiaque que christique, comme si les symboles oscillaient d’une pensée à une autre, des chrétiens aux grecs, sans contradiction ni anachronisme, une couronne, non pas d’épine mais de branches de figuier ramassées par l’artiste au cœur de l’hiver. Dionysos est là, divinité étrangère, conjuratrice de l’angoisse et portée aux excès. Dionysos franchit toutes les limites, éclate, renaît, il ne peut qu’être un signe existentiel sur le chemin de tous, mais encore la manifestation du combat entre forme et informe, unité et fragments, vide et densité. Ce qui s’ajoute ici s’entrechoque, s’épure plutôt que s’additionne et alimente l’énigme.
Florence Andoka